Garantie décennale : Les éventuelles modifications apportées par la loi Elan
La loi logement de 2018, ou loi Elan, va apporter de nouvelle réforme sur le droit immobilier et les règles de l’assurance construction. Dans la pratique, la loi Elan représente une initiative louable, mais elle reste néanmoins sans véritable portée pour encadrer l’assurance décennale. Plusieurs amendements déposés et votés dans le cadre de l’adoption de la loi Elan prévoient de modifier les limites de l’assurance construction obligatoire. Ces amendements visent principalement à restreindre le champ d’application de l’assurance décennale en cas de travaux sur existant. Cela consiste à mettre fin aux conséquences apportées par une jurisprudence depuis 2017 concernant la mise en jeu de la garantie décennale sur l’installation d’éléments d’équipement sur des bâtis existants.
L’installation d’un élément d’équipement dissociable sur un bâti existant
L’arrêt rendu par la Cour de cassation le 15 juin 2017 a alimenté le débat parlementaire sur l’assurance construction obligatoire depuis le 30 mai jusqu’au 8 juin dernier. La Cour de cassation l’a repris à quatre reprises cette décision. Pour rappel, cet arrêt de la Cour de cassation confirme la mise en jeu de la garantie décennale sur l’installation d’un élément d’équipement dissociable sur un bâti existant lorsqu’elle rend l’ouvrage impropre à sa destination. Il peut s’agir de pompe à chaleur, d’insert de cheminée et de revêtement de sol dès lors que l’installation rend le bâti nouvellement équipé impropre à sa destination. Cet arrêt a élargi considérablement le champ d’application de la responsabilité décennale, car des travaux qui n’impliquaient pas la responsabilité décennale des constructeurs jusque-là la deviennent. Un simple installateur qui intervient sur des bâtis existants pour changer ou ajouter tel ou tel équipement est désormais susceptible de voir sa responsabilité engagée en cas de dommages de nature à rendre l’ouvrage impropre à sa destination. Cette extension de l’application de la garantie décennale soulève de nombreux débats en cas de revente du bien par exemple.
Pas de grande efficacité pour contrer les courants jurisprudentiels
Selon les analystes, les amendements successivement adoptés ne permettent pas encore d’atteindre le résultat escompté. Dans l’état actuel des débats, les textes ne permettent pas de définir dans quelles hypothèses de travaux l’assurance obligatoire permet de couvrir les existants. Certains points de ces amendements étaient limités sur les hypothèses de construction d’un ouvrage sur existant, et ne parlent pas de celles de travaux de simple installation d’un élément dissociable. Deux autres modifications ont été apportées par les Sénateurs pour élargir les exclusions de l’assurance obligatoire. La première porte sur le remplacement de la proposition « ces assurances obligatoires ». La seconde précise que ces assurances ne sont pas applicables à certaines hypothèses.
En somme, l’ambition du législateur est de limiter les effets de la jurisprudence développée depuis 2017. Les textes de la loi Elan (Évolution du logement et aménagement numérique) sur l’assurance obligatoire devraient viser plus précisément les hypothèses appréhendées par cette jurisprudence : les travaux d’installation d’équipements nouveaux sur existant. Mais actuellement, les modifications proposées ne sont pas parvenues à faire la distinction entre les travaux entrant dans le champ d’application de l’assurance obligatoire et les dommages couverts ou non. Toutefois, le texte n’écarte pas pour l’heure actuelle l’obligation d’assurance décennale en cas de travaux d’installation d’un élément d’équipement dissociable. Et en l’état actuel des débats, le texte n’a pas de grande efficacité pour contrer les courants jurisprudentiels depuis 2017.